
Vous pouvez visualiser ou lire l’homélie prononcée au cours de la messe de dimanche 28 mars 2020 en la chapelle de la communauté des Missions Africaines des Naudières, Rezé. Vous aurez l’occasion de suivre en direct la messe de dimanche prochain sur youtube de la paroisse Bienheureux Marcel Callo.
5ème dimanche de Carême
C’est un très beau texte d’Evangile que nous venons d’écouter en ce dimanche. Il nous introduit directement au mystère de Pâques, au mystère de la mort et de la résurrection du Christ-Jésus qui est au cœur de notre foi.
Quelle fut la maladie de Lazare ? De quoi est-il mort ? Quel virus a-t-il attrapé pour s’en être allé si vite ? L’Evangile ne le dit pas, et nous ne le saurons jamais. Mais tout a dû aller très vite, comme aujourd’hui pour les victimes du coronavirus, puisque, selon l’Evangile, Jésus annonce la mort de Lazare très peu de temps après avoir été prévenu de sa maladie.
L’événement que nous rapporte saint Jean est riche d’enseignement.
- Quand la maladie arrive quelque part, elle bouleverse la vie. Nous le savons bien. Soudain, on se sent seul. Pour se rassurer, on cherche naturellement du secours auprès de ceux qui nous sont les plus proches. C’est pourquoi Marthe et Marie ont voulu prévenir Jésus pour qu’il soit informé et vienne vite à leur aide : Seigneur, celui que tu aimes est malade. Il n’y avait pas d’internet à cette époque, pourtant la nouvelle est arrivée très vite. Et cela nous révèle la profonde amitié que Jésus portait à cette famille de Béthanie. Un jour, il y avait reçu l’hospitalité, et il avait trouvé en Marie une oreille attentive. Maintenant, c’était son tour d’écouter avec attention la nouvelle qu’il venait d’apprendre : Seigneur, celui que tu aimes est malade.
- Jésus va prendre son temps avant de réagir. Il n’a pas sauté dans le premier train pour arriver au plus vite, pour saluer son ami et consoler ses sœurs. Il a pris tout son temps. Deux jours perdus alors que le moment est grave, qu’il n’y a pas de temps à perdre parce que l’on a besoin de lui. Jésus ne se précipite pas car, si son heure est proche, elle n’est pas encore venue. Quand Jésus se met en route, et que ses disciples veulent le retenir, il leur annonce ce qu’il sait déjà : Lazare est mort, mais en lui va se manifester la gloire de Dieu. C’est cela qui est au cœur de la vie de Jésus et qui le met en route : la gloire de Dieu. Mais la gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, l’homme guéri, c’est l’homme ressuscité.
- Arrivant à Béthanie, Jésus voit Marthe se précipiter vers lui. Il savait bien que ce serait Marthe qu’il verrait la première, Marthe toujours réactive aux événements, toujours disponible pour faire ce qu’il faut faire. Et le dialogue est direct. Une sorte de reproche ou de regret d’abord : Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. Ce qui veut dire : Tu l’aurais guéri, lui ton ami, comme tu l’as fait pour tant d’autres. Puis une immense confiance : maintenant encore, je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te le donnera.
Jésus reçoit cette parole, et il y répond : ton frère ressuscitera ; ce qui veut dire pour lui : Il ressuscitera aujourd’hui, maintenant. Mais Marthe ne peut pas comprendre ce que Jésus veut lui dire, et elle répond avec la foi qui l’habite, la foi de beaucoup de Juifs de cette époque : Je sais qu’il ressuscitera lors de la résurrection au dernier jour.
J’imagine que Jésus a dû la regarder très longuement, les yeux dans les yeux peut-être, avant de lui dire : Je suis la résurrection et la vie. Oui, Marthe a bien raison d’espérer pour son frère, car l’ami qu’elle a fait appeler et qui est là près d’elle est le Maître de la vie. Devant lui, la mort ne peut avoir le dernier mot. Crois-tu cela ? C’est la même question que jésus avait posé hier à l’aveugle-né. Et Marie de répondre avec toujours la même spontanéité : Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le Fils de Dieu, Celui qui vient dans le monde. Elle ne sait pas encore exactement ce que cela veut dire, elle le saura dans quelques jours lorsque la Pâque aura eu lieu. Mais jamais personne avant elle n’a dit une chose pareille : elle devient, pour saint Jean, le véritable disciple, celle qui est aux portes de la découverte du mystère de Jésus.
- Ayant accueilli Jésus et parlé avec lui, Marthe court vers sa sœur. Le Maître est là et il t’appelle. Et nous comprenons combien nous sommes différents les uns des autres. Marthe est dans la tristesse, mais elle trouve, dans sa foi et dans la présence même tardive de jésus, la force de rester debout, de faire face à ce qui est arrivé. Marie au contraire est enfermée dans sa peine, dans ses pleurs ; elle ne peut pas se consoler de la mort de Lazare. Quand elle rejoint Jésus, elle lui redit son espoir déçu : si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort. Mais sa gorge est nouée ; à la différence de sa sœur, elle n’a rien d’autre à dire. Sa confiance, elle l’exprime en se jetant aux pieds de Jésus, comme jadis elle s’était assise à ses pieds pour écouter sa parole.
Et Jésus va l’accueillir comme elle est. Il sait qu’elle est inconsolable, et qu’il ne sert à rien de lui dire quelques mots inutiles. Devant la douleur de Marie, Jésus, lui aussi, saisi par l’émotion, ne peut retenir ses larmes, et il va se mettre à pleurer. Près de la tombe de Lazare, Jésus, l’Homme-Dieu, a pleuré, et il a ressenti que la mort est le mal suprême qui gâte la vie de l’homme. Il a compris qu’il était venu pour nous en délivrer et nous faire le don de sa vie éternelle.
- Et nous retrouvons enfin jésus devant le tombeau de Lazare. Il est face à la mort qu’il est venu terrasser. Mais il n’est pas seul, le Père est avec lui. Alors Il commence par prier. Il prie le Père avec qui il ne fait qu’un, le Père dont il est l’envoyé, le Père qui l’exauce toujours. Et c’est un cri qui sort de sa gorge : Lazare, viens dehors. Puis : Déliez-le et laissez-le aller.
Cette page d’Evangile nous révèle vraiment qui est Jésus. Il est vraiment l’un de nous, il nous ressemble jusqu’à pleurer. Mais il est tellement plus que cela ; il est l’Envoyé du Père et le Maître de la vie. Devant lui, la mort ne peut avoir le dernier mot. Il en est vainqueur, et il veut nous entraîner dans sa victoire. Mais la mort dont il veut nous libérer n’est pas d’abord celle que nous croyons. Ce dont Il veut nous libérer, c’est du péché qui nous habite et qui nous fait croire que nous n’avons pas besoin de Dieu parce que nous serions les maîtres de notre vie. Jésus est venu pour nous redire simplement que vivre, c’est aimer, c’est ressembler à Dieu, à Dieu qui n’est qu’amour. Il est venu nous apprendre que celui qui aime est déjà passé de la mort à la vie. Il est déjà entré dans la vie éternelle.
Devant le tombeau de Lazare, Jésus sait bien que, dans quelques jours, il sera mis à mort. Mais il le sera en toute liberté, parce que son heure est enfin venue. Il sera mis à mort par fidélité à son Père et par amour des hommes qu’il est venu sauver. Il sait qu’il en sera victorieux parce que, comme le dit la foi d’Israël, Dieu ne peut laisser le juste voir la corruption.
Alors, puisque, par le baptême, nous avons été plongés dans la mort et la résurrection du Christ, demandons-lui de nous aider à grandir dans la foi qui est la nôtre, à progresser dans l’amour de celles et ceux que nous rencontrons. C’est l’amour au quotidien, et rien d’autre, qui nous fait passer avec le Christ de la mort à la vie éternelle. Amen